Place d’Arménie les papiers volent sous le vent de l’oubli. Souvenirs en volutes dans la poussière de la ville. Gros grain dans l’œil à ne pas voir— à ne pas voir là, les trois visages à ton pied. Ta semelle sur la place à peine trace l’espace que les trois regards plaquent tes pas aux égouts de l’histoire.
Passe à rebours la jaune ironie crevant ses sacs au vent des souvenirs. Dans les volutes peut-être s’esquisse aux commissures, des lèvres, là, de l’œil et de la moustache, peut-être s’esquisse au revers des raies au vent un sourire parmi les traits des visages encore présents des Arméniens sur la place, sur la place d’Arménie, à savoir ne connaître jamais le biais de tous tes pas.
Derniers égards aux pas croisés. Silence de ceux qui restent. Silence de ceux qui passent. Témoins fragiles de la place, demain s’effacent les faces. Mais toi tu ne le sais pas, naïf passant du présent.
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Texte écrit par Claire Dutrait, pour Urbain, trop urbain, qui invite sur son site mon texte « Passe et repasse, belotte et rebelotte », dans le cadre du projet des vases communicants: “Le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement… Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre.”
http://www.urbain-trop-urbain.fr/passe-et-repasse-belote-et-rebelote
Nous somme là dans ces images « d’à côté » (ou images du fossé). Les trois me parlent beaucoup.
Bravo Léo !
Rémy